Extrait :
L'extension du machinisme et la division du travail ont fait perdre au travail des prolétaires tout caractère d'indépendance et tout attrait. Le producteur devient un simple accessoire de la machine à qui on ne demande que le geste manuel le plus simple, le plus monotone, le plus vite appris. Par conséquent, le coût du travailleur, c'est à peu près le coût des vivres dont il a besoin pour son entretien et pour perpétuer sa race. Or le prix de toute marchandise, donc aussi du travail, est égal à son coût de production. Il s'ensuit que plus le travail devient répugnant, plus le salaire baisse. Bien plus : à mesure que le machinisme et la division du travail s'accroissent, la somme de labeur augmente, soit par la prolongation de la durée du travail, soit par l'augmentation du travail exigé dans un temps donné, par le mouvement accéléré des machines, etc.
L'industrie moderne a transformé le petit atelier de l'artisan patriarcal en la grande fabrique du capitaliste industriel. Des masses ouvrières s'entassent dans les usines et y sont organisés comme des soldats. Simples soldats de l'industrie, ils sont placés sous la surveillance de toute une hiérarchie de sous-officiers et d'officiers. Ils ne sont pas seulement les esclaves de la classe bourgeoise, de l'État bourgeois. Jour par jour, heure par heure, ils subissent le joug de la machine, du contremaître et, avant tout, des fabricants bourgeois eux-mêmes. Despotisme d'autant plus mesquin, odieux, exaspérant, que son but, hautement avoué, c'est le profit.
Moins le travail manuel exige d'habileté et de force, autrement dit plus l'industrie moderne se développe, plus le travail des hommes cède la place à celui des femmes et des enfants. Les distinctions de sexe et d'âge ont perdu, pour la classe ouvrière, toute signification sociale. Il n'y a plus que des instruments de travail dont le coût varie en fonction de l'âge et du sexe.
Karl MARX et Friedrich ENGELS, Le Manifeste du parti communiste, tr. Laura Lafargue, dans Karl MARX, Philosophie, Folio Essais,1994, p. 407-408.
Questions :
1. Que signifie la "perte d'indépendance" du travail des prolétaires" ?
2. Analysez dans cet extrait en quoi les prolétaires sont doublement dépendants - de la machine, et de l'homme.
3. Pour qualifier cette organisation du travail, le texte mobilise un vocabulaire militaire et politique. Analysez-en la signification et l'effet.
4. Pourquoi la mécanisation du travail en usine est-elle, selon vous, à l'origine de l'emploi des hommes et des enfants ?
5. Si les prolétaires ne sont plus que des "instruments de travail", sont-ils encore pleinement humains ?
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